Vincent Courtois, Daniel Erdmann, Robin Fincker – Nothing Else

La configuration de ce trio — dont Vincent Courtois était à l’origine le leader mais qui a depuis pris une dimension collective puisque les trois compaires composent ensemble — est absolument inédite.

Un violoncelle et deux anches, ça ne s’était jamais vu. Mais le but du trio n’est pas d’être à tout prix original. Ce qui guide ces trois musiciens c’est une même vision du son de groupe lié à une évidente compatibilité de leurs sonorités individuelles. Ils ont abondamment voyagé ensemble, entre autres sur la Côte Ouest des USA sur les traces de Jack London, dont Courtois est un grand lecteur.

Ici, il est toujours question de voyages puisque chaque titre des seize morceaux, majoritairement courts, porte le nom d’une ville : de Portland à Budapest (où a été enregistré le CD), de Groningen à New York, de Port Louis à Kuopio…

Voyager et faire voyager les auditeurs, c’est clairement le but de ce trio et le moins qu’on puisse dire c’est qu’ils y réussissent.

Par la grâce de leurs sonorités individuelles pour commencer. Courtois en pizzicato ou à l’archet, Robin Fincker au saxophone ou à la clarinette et Daniel Erdmann au ténor possèdent chacun une identité où tout auditeur muni d’une paire d’oreilles en état de fonctionner décèlera une éclatante maturité dans l’approche du son.

Aucun leader dans ce trio où chacun accompagne les deux autres ou prend à son tour, en solitaire, un bref solo.

Le violoncelle n’assume pas ici une fonction de basse mais déploie à égalité avec ses deux partenaires les volutes envoûtantes de son timbre profond.

Les deux saxophonistes possèdent chacun une voix propre et l’imbrication de leurs magnifiques sonorités a quelque chose de fascinant.

Quant à la clarinette, elle apporte sur quelques titres une couleur d’une fraîcheur inédite et bienvenue.

Cette musique autant pensée que sentie a quelque chose d’éminemment charnel d’autant plus que l’enregistrement et le mixage remarquablement effectués par l’ingé-son hongrois Viktor Szabo rendent la présence des trois instruments si palpable qu’on se croirait dans la même pièce qu’eux.

Une totale réussite, donc, de la part de musiciens européens qui, n’ayant plus à faire leurs preuves, peuvent se permettre de jouer une musique inouïe à laquelle on a de la peine à imaginer qu’on puisse rester indifférent.

Remarquable !