C’est une grosse grosse machine que ce big-band, avec des pupitres très étoffés qui comptent un certain nombre de pointures de l’instrument. Réunissant des musiciens de studio de Miami et des environs, le bassiste Chuck Bergeron qui est également le directeur de l’orchestre nous invite ici avec son pléthorique personnel à une écoute des arrangements du saxophoniste Gary Lindsay qui a en outre composé et arrangé pour le big-band de Maynard Ferguson.
La formation revisite à cette occasion quelques standards mémorables comme l’incontournable Round Midnight mais aussi le Better Days Ahead de Pat Metheny ou encore le fameux UMMG de Billy Strayhorn.
Nombre de musiciens ont déjà fait leurs classes dans les formations de Woody Herman, Buddy Rich et Maynard Ferguson sans compter des participations avec Stan Getz, James Moody, Dave Grusin et même Frank Sinatra. Non seulement sidemen, certains se sont même déjà fait un nom en tant que leader, on pense à Greg Gisbert, Alex Norris, Ed Calle et Jason Kush, sans parler du guest star de l’enregistrement, le ténor Rick Margitza.
La performance est ici à la hauteur de l’harmonie d’ensemble. On retrouve un invariant de la patte des big band états-uniens : le placement est taillé au cordeau, la syncope coupée au massicot et le tout dans des arrangements affinés au pied à coulisse. Mais cet assemblage millimétrique ne doit pas faire penser que la technique prend le pas sur le reste. Il y a une réelle liberté d’expression qui explose en métaphores syncopées et les interventions de tous les solistes sont à la fois calculées et enivrantes. Il suffit d’écouter le Toward Hope où excelle Margitza pour s’en convaincre. La partition est descendue, inattendue et surprenante comme Bullit dans les rues de S.F. La musique n’est d’ailleurs pas sans rappeler parfois les thèmes des polars noirs du cinéma US des années 70.
De l’Art de Rejouer des Standards
Un côté bluesy aussi dans le thème Easy Leaving parfaitement délivré par la chanteuse Nicole Yarling rehaussé en valeur par l’épique solo de Gisbert à la trompette, avant que le swing ne reprenne son pas cadencé par les pupitres et le scat de la vocaliste. Une remarquable relecture.
John Hart à la guitare sur Better Days Ahead joue les araignées dans la toile que lui tendent les pupitres cuivrées et entame un dialogue intimiste avec le piano électrique.
Entre une somptueuse réinterprétation de Round Midnight ouatée dans une étoffe lourde de cuivres dans laquelle le terme de grosse machine prend tout son sens et un groupe médical de Manhattan soigné à coup de baryton et de trompette, on se laisse emporter par la fougue de la construction et les interventions brillantissimes des solistes.
Des interprétations de très grande qualité servies par une prise de son irréprochable où chaque poste est clairement distingué font de cet album un must absolu dans le genre et qui relance l’attrait pour un jazz en (très) grande formation, dans tous les sens du terme.
Un big band à découvrir absolument en poursuivant sur deux autres enregistrements, « South Florida Jazz Orchestra » paru en 2008 et « Trumpet Summit » de 2012 avec le trompettiste Brian Lynch en invité exceptionnel. A noter que l’on attend la sortie du dernier qui doit être orienté autour des compositions de Rick Margitza.
Interprètes :
Augie Hass, Jeff Kievit, Greg Gisbert, Jason Carder, Alex Norris, Peter Francis – Trompettes
Dana Teboe, Dante Luciani, John Kricker, Major Bailey, Derek Pyle, Andrew Peal – Trombones
Gary Lindsay (Alto, clarinette), Gary Keller (Alto, soprano, flute), Ed Calle (Ténor, flute),
Phil Doyle (Ténor, flute), Jason Kush (Ténor, flute), Mike Brignola (Baryton, clarinette basse) – Saxophones
Martin Bejerano – Piano, piano électrique
Chuck Bergeron – Contrebasse, basse électrique
John Yarling – Batterie
John Hart – Guitare
Ksenjia Komljenovi – Vibraphone, xylophone
Brian Potts – Percussions
Julia Dollison, Nicole Yarling – Chant
Invités : Richard Todd, Cor – Rick Margitza, Saxophone ténor
L’album est édité en 2018 chez Summit Records
©Photos tous droits Réservés.
L’album es en sélection Couleurs Jazz Radio.
COMMENTAIRES RÉCENTS