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Hilarious Jazz.
C’est le pari gagné du pianiste finlandais, Iiro Rantala, quand il s’attaque aux saisons de son pays natal. 

Le musicien brosse au clavier les caractères et les moeurs des habitants d’une terre soumise aux variations du climat. L’humour est ravageur, les mélodies subtiles et emplies d’un éclat de rire intérieur aussi puissant que la mélancolie. La Finlande a parfois mal à la température estivale, aux couleurs de la neige, à la lumière quand elle se réduit à une ligne à l’horizon. Il y a ces maudits jours d’été qu’on attend toute l’année et les plans sur la comète qu’on projette en famille, entre amis, quand la durée de cette saison-là ne dépasse pas les trois semaines. « Vivaldi ne connaissait pas la Finlande », annonce d’emblée Rantala.

Douze mois, douze saisons, d’où le titre de l’album, « My Finnish Calendar ». 

En novembre, explique-t-il, le Finlandais partirait bien à Paris, pour échapper à ce mois qui s’assombrit. Et le voilà lui-même, face à un public parisien à qui il raconte les mille astuces possibles élaborées chez lui pour déjouer les pièges de l’humeur. Nul doute que le ragtime ravageur de Rantala ne fasse surgir l’oiseau moqueur. Aussi bon musicien qu’acteur, micro au poing, il contrefait son compatriote, l’imite, se raille de lui-même dans le film projeté tout au long du concert et qui plane au-dessus du manteau parfois monocorde et onirique du paysage. On le voit, marchant, sautant, jusqu’à un dernier bain glacial pris en plein hiver. Qu’on imagine revigorant, comme en témoignent ses poings serrés.

Chaque mois traduit les travers de la société et les rites partagés. L’alcool, le sexe, le sauna, les traditions familiales, l’argent qu’on ne dépense pas, tout y passe. Et de foncer au piano à chaque fois pour donner un corps musical à l’image qu’il vient de faire surgir. Il mime aussi le geste qui lui permet de tracer les deux premières initiales de son prénom dans la neige et de gagner les concours entre voisins, exclusivement masculins, où celui qui gagne est celui qui urine le plus loin. Le jeu témoigne tout autant que les autres récits de la longueur de la saison hivernale, qu’il faut rompre à tout prix.

Iiro Rantala ne craint personne et surtout pas au piano.

Il dépeint la romance amoureuse de septembre, l’affluence des naissances du mois de mars et forcément neuf mois auparavant une certaine effervescence. Qu’on se rassure, le temps de gestation est le même ailleurs qu’en Finlande.

Ah, le mois de juin ! Ah, les vacances des enfants imposées aux parents qui travaillent encore. Quelle partition !

Il faut l’écouter ce mois qui part à l’assaut de pique-niques organisés dans l’herbe, d’où l’on repart en courant la couverture sur la tête, les sandwichs trempés, pour échapper aux trombes d’eau, parce que oui, il pleut. Et tout le morceau reprend la progression ascendante de chaque initiative, qui se solde par un dérapage rythmique comique à la Chaplin. À chaque fou rire du public, le musicien sait qu’il vient de tordre le cou aux clichés qui enserrent autant le quotidien humain que le jazz.

À écouter sans modération, même quand il fait beau.

My Finnish Calendar est un album du label ACT.

C’est le 10ème album de Iiro Rantala, son 3ème en solo.

 

 

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