Laurent Cugny Tentet – Zeitgeist

C’est un tentet hautement original que nous propose Laurent Cugny pour son retour dans les bacs des disquaires après plusieurs années de silence phonographique.

Original tout d’abord par son instrumentation : pas moins de trois claviers électriques, deux batteries et deux anches allant de l’aigu (sax soprano) au grave (clarinette basse). Une guitare, une trompette et une contrebasse viennent compléter cet instrumentarium dont on sent que le but est de forger un son épais et charnu.

C’est effectivement ce son qui frappe d’emblée et qui séduit immédiatement par sa saveur à la fois dense et ductile. Originale ensuite par son répertoire qui va de compositions du leader à un thème de Joni Mitchell, un autre de Joe Zawinul et des Beatles, un morceau de Duke Ellington et même une chanson de Michel Jonaz.

Un éclectisme bienvenu qui couvre un large espace temporel par rapport auquel les arrangements de Cugny constituent le liant stylistique dans la mesure où son écriture est à la fois résolument moderne et pétrie d’une tradition qui remonte aux premiers opus électriques du Miles Davis des années 70. « Zeitgeist » (esprit du temps en allemand) semble donc un titre parfaitement approprié car Cugny actualise cette esthétique qu’il connaît bien pour avoir entre autres collaboré avec Gil Evans.

Sur ce substrat orchestral où les voix des trois claviers tissent une trame mélodique et harmonique somptueuse tandis que les batteries assurent un soutien rythmique subtil et foisonnant viennent se greffer les solos des souffleurs, de la guitare ou d’un des claviers.

Des solos aux couleurs chatoyantes qui se fondent dans l’esthétique globale tout en affirmant la voix individuelle de chaque instrumentiste.

Au total on a là une œuvre fortement singulière et qui devrait faire date tant elle donne un coup de jeune à un genre orchestral assez peu représenté ces dernières décennies. Magistral !