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Afin de fêter dignement les 30 ans du festival, « Jazz à Junas » (dans le Gard) a décidé pour les soirées de clôture de la manifestation, de marquer son originalité en matière de programmation en mettant le cap au Nord, en invitant, notamment, dans le cadre magnifique des Carrières du Bon Temps, un sacré aréopage de jazzmen nordiques.

Le jazz puissamment mariné à l’aneth de Lars Danielsson

Le contrebassiste suédois, qui a fait vibrer les cordes de son instrument avec des pointures comme Charles Lloyd, John Scoffield, Jack DeJohnette ou encore Dave Liebman, était venu à Junas présenter l’univers très mélodique et rythmique de son album « Liberetto« . (à l’écoute et célébré sur Couleurs Jazz Radio).

Et l’une des caractéristiques principales de cette création réside dans le crescendo. D’abord évoquée dans un calme apparent, les diverses compositions du leader, montent en puissance jusqu’à atteindre une forme de paroxysme orgasmique. Une musique atmosphérique assumée, créatrice d’espaces, remplie de contrastes et de rythmes colorés, aux thèmes enlevés.

Dont l’un des principaux artisans est le pianiste martiniquais Grégory Privat.

Sous ses doigts et avec intelligence, élégance et beaucoup d’inventivité, il parvient à emporter le quartet – et le public qui clôturera le set par une « standing ovation » bien méritée ! – vers des horizons où la musique semble démultipliée par la puissance de son jeu, ancré dans les plus belles pages de la riche histoire du piano jazz.

Quant au leader, il s’est fendu notamment d’un magnifique et particulièrement inspiré long solo de contrebasse qu’il a su faire chanter et vibrer avec émotion et exaltation.

Si une mention spéciale doit également aller à Magnus Oström, ex- batteur du trio E.S.T, qui derrière ses cymbales et ses fûts, a très largement contribué au côté impétueux et frénétique de cette musique, un regret cependant à propos du guitariste anglais John Pariccelli, privé d’une partie de sa prestation en raison de problèmes techniques.

Lars Dannielsson a time in jazz ©Photo Roberto Cifarelli

Musiciens :

Lars Danielsson : contrebasse

Grégory Privat : piano

Magnus Oström : batterie

John Pariccelli : guitare

 

L’omelette norvégienne de Nils Peter Molvaer.

Le trompettiste norvégien Nils Peter Molvaer est considéré comme un des pionniers de la fusion entre le jazz et les musiques électroniques voici près de trente ans, même s’il s’en défend aujourd’hui.

C’est au milieu des années ’90, qu’il compose une œuvre référence du style – et quasiment jamais exécutée en France sauf pour le 1ère fois à « Jazz à Junas » en 1999 ! – intitulée « Khmer« .

« Au départ, c’était une œuvre commissionnée pour un festival de jazz en Norvège qui s’appelait à l’origine « Laberits« . C’est lors de l’enregistrement en studio avec Manfred Eicher (ndlr : patron des disques ECM), que ce dernier l’a appelé +Khmer+. En fait, il voulait la nommer +Khmer Rouge+. Mais c’était trop ! » a-t-il déclaré lors d’un entretien à Couleurs Jazz à l’issue de son concert à « Jazz à Junas« .

« Reprendre ce travail aujourd’hui relève de la coïncidence. C’est une forme de renaissance. J’ai donc rappelé tous les musiciens à l’origine du projet, à l’exception d’un guitariste qui était décédé entre temps, qui étaient partants pour créer une nouvelle atmosphère« , a-t-il ajouté.

Atmosphère (« atmosphère »…..!!!!) est bien le terme qui convient à ce projet archétype du « Nujazz« .

Un son de trompette électrifiée rappelant immanquablement celui de Miles Davis, quelques notes éparses, clairsemées mais d’une exceptionnelle justesse, lancées avec délicatesse, finesse et un raffinement ostensible, le tout au milieu d’un paysage sonore dopé à l’électronique, aux claviers de deux DJs et aux foudres rythmiques de deux batteurs : ainsi pourrait-on résumer la version de « Khmer » donnée dans les Carrières de Junas, dont le décor colle à merveille à cette musique créée à un notre âge, cependant toujours moderne et d’actualité.

Et au milieu de ces effusions rythmico-mélodico-électro, une magnifique et poignante reprise en solo absolu à la trompette de « Nature Boy« . Une belle démonstration car même en allant au-delà des genres, ne jamais oublier les fondamentaux !    

©Photo Yanick Dumas

Nils Peter Molvaer : trompette

Elvind Aarset : guitare

Jan Bang & DJ Paal Nyhus : platines

Audun Erlien : basse électrique

Per Lindvall & Rune Arnesen : batterie

 

Les humeurs d’Humair

A 85 ans, dont plus de soixante de carrière, le batteur et peintre suisse Daniel Humair, dont certaines œuvres composent les vitraux du temple de Junas, possède un CV long comme le bras pour avoir joué avec tous ceux qui comptent pour le jazz de Stéphane Grappelli à Eric Dolphy et pour avoir participé activement à l’élaboration d’un jazz européen toujours tourné vers la libre expression et l’improvisation créative.

Pourtant, ce magicien des baguettes et des fûts au style unique, semble être (re)devenu un « sage » en vieillissant.

Si la musique qu’il pratique avec des complices de premier ordre, parmi lesquels son compatriote le tromboniste Samuel Blaser, est toujours aussi marquée du sceau d’une certaine liberté, il n’hésite pas aujourd’hui à faire un clin d’œil au passé et remonter le temps, sinon le tempo !

Dans cet esprit, il adapte « Les Oignons » de Sidney Bechet les renommant  « Les Echalottes« , évoque « High Society« , un standard du jazz New Orleans magnifié par le clarinettiste Alphonse Picou, reprend « Send In The Clowns« , une chanson des années ’70 devenue un véritable tube populaire. Le tout sans perdre le fil de l’audace de l’improvisation.

©Photo Marc Duponcel

Daniel Humair : batterie

Samuel Blaser : tromb one

Vincent Lê Quang : saxophone

Stéphane Kerecki : contrebasse

©Photo Header, Marc Duponcel

©Photo couverture, Nils Peter Molvaer by Roberto Cifarelli

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