« On va se faire plaisir !»
Le Live et l’Album.
Un mythique lieu du jazz parisien a accueilli Gérard Naulet pour la sortie de son nouvel album le lundi 5 février dernier. Avec ses airs de vieil entrepôt, son plafond où se mêle une tuyauterie apparente et son plancher usé par le temps, le New Morning est le lieu désigné pour célébrer l’amitié de trois musiciens d’exception.
« Viaje a la amistad » se veut en effet un hommage à vingt ans d’aventures musicales partagées par Gérard Naulet (piano), Orlando “Maraca” Valle (flûte traversière) et Orlando Poleo (percussions), ainsi qu’à la musique latino-américaine
L’album compte cependant avec la participation de nombreux autres “amigos”. Au total, dix musiciens interviennent sur l’enregistrement !
Trois contrebassistes différents sont invités : Felix Toca, Felipe Cabrera et Jean-Michel Charbonel, malheureusement absent au concert du 5 février. La formation compte également avec deux trompettistes, Tony Russo et Philippe Slominski (ce dernier joue aussi du bugle sur certains morceaux), Irving Acao au saxophone ténor et Simon Ville-Renon aux timbales. Carlos Esposito au chant et au güiro est invité pour le concert.
L’ambiance est festive ce soir-là au New Morning, la complicité entre les musiciens apparaît comme une évidence. Gérard Naulet est perpétuellement ravi.
Rien ne saurait effacer le sourire qui l’habille du premier morceau jusqu’au rappel. Felix Toca, tout de rouge vêtu, coiffe sa baby bass de son chapeau et danse presque avec elle au son des “montunos”. Orlando Valle, lui, ne tient pas en place. On l’appelle « Maraca » depuis sa jeunesse à cause de sa ressemblance avec ledit instrument que lui conférait sa minceur et la coupe afro qu’il portait et il s’agit là d’un véritable virtuose de la flûte. Ses phrases s’enchaînent dans un rythme effréné, chaque solo plus diabolique que le dernier. Mais il ne se contente pas de faire chanter sa flûte, il s’occupe également de la direction, et quand ce n’est pas à lui de jouer, il chante, danse, se met au piano aux côtés de son ami ou bien s’installe à la batterie abandonnée là par le groupe précédent. Son énergie nous captive. Tous revêtent un sourire et chantent les “coros”, le public ne peut que lui aussi se laisser envahir par cette joie de vivre, de chanter, de danser… de faire de la musique.
Le répertoire est constitué de reprises et compositions, de musique traditionnelle cubaine, salsa, boléros, danzones, descargas et de latin jazz. Si tous les musiciens ne sont pas latino-américains, ils sont passionnés par cette musique qui nous vient des caraïbes et sont d’excellents solistes. Le public est aux anges. “Alena” est un morceau dédié à la fille de Maraca, ce dernier l’a écrit le jour même de l’enregistrement. Doux et émouvant, il traduit la tendresse d’un papa pour sa petite fille. Le “maestro” Orlando Poleo, décrit par certains comme « l’un des meilleurs percussionnistes au monde », avec son placement légèrement en arrière qui donne tout le « sabor » à son jeu, nous offre “Arriba mi montuno”, une “descarga” comme on les aime, joyeuse et aux coros contagieux. Naulet joue « Obsesión », boléro traditionnel cubain, en duo avec Slominksi au bugle. Son jeu devient alors plus lyrique, sans retenue, comme un Chopin des tropiques, il s’étend sur son clavier en de belles promesses romantiques.
En annonçant ce morceau, le pianiste avait dit « on va se faire plaisir !». C’est bien ce qu’on aura retenu de ce concert. Un pur moment de plaisir partagé entre les musiciens et le public, un intervalle haut en saveurs et en arômes, le tout sous le ciel du New Morning, qui a été témoin de tant de soirées similaires et continuera à en faire son vécu.
Écoutons « Viaje a la amistad, ici :
« Viaje a la Amistad » est un album Adlib prod
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