« Some Like it Hot », le blog de Louis Victor
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Lundi 18 août. Au tour de Dee Dee Bridgewater d’investir la scène du Phare. En première partie, le « roi » René Urtreger, pianiste historique de la scène parisienne — désormais malheureusement un peu trop oublié. Rappelons seulement qu’il fut le sideman de tous les grands américains de passage à St Germain des Prés. Sonny Rollins appréciait ses qualités d’accompagnateur, tout comme Miles Davis qui l’a choisi comme pianiste pour enregistrer la bande originale d’Ascenseur pour l’échafaud, film noir à la sauce Louis Malle.
A 22h arrivent les musiciens de Lady Dee. Cinq jeunes pousses new-yorkaises dégageant une énergie rafraîchissante et absolument réjouissante. Difficile de ne pas être subjugué par l’immédiate prestance du quintet. Le batteur à lunettes fumées arbore un faux-air de Thelonious Monk. Theo Croker, trompettiste et leader, affiche un style vestimentaire on ne peut plus « brooklynien » : un hispter dans toute sa splendeur. Au sax alto, Irwin Hall emprunte à la gestuelle et aux pas de danses de Maceo Parker avec un sourire indéfectible, alors que l’imposant contrebassiste Eric Wheeler reste droit dans ses bottes. Après un prélude instrumental, Dee Dee Bridgewater débarque de noir vêtue, un chapeau vissé sur la tête. Elle entame un « Afro Blue » avant d’enchaîner sur une version de « Blue Monk » dont les paroles ont été écrites par Abbey Lincoln. Le tempo est particulièrement lent, les musiciens installent une pulsation ancrée dans le sol, un groove ahurissant. Cette version du standard de Thelonious Monk dure 10 bonnes minutes : les solos instrumentaux entrecoupent les envolées scat de Dee Dee qui chante le blues avec une force tellurique. Irwin Hall prend plusieurs chorus d’improvisation ; le public se prend une claque magistrale.
Ainsi le concert continue sur un répertoire de standards et de reprises pour se terminer par un double rappel en clin d’œil à Stevie Wonder. La foule qui s’époumonait une heure plus tôt pour demander aux premiers rangs de s’asseoir (roulez, jeunesse) s’est finalement levée pour danser timidement. A ce moment, on se dit que le groove d’Earth Wind & Fire Experience feat. Al McKay (que l’on a pu écouter la veille) ne vaut pas grand chose, en définitive. A quelques minutes de la fin, chaque spectateur affiche un sourire aux lèvres en écoutant attentivement Miss Bridgewater remercier chaleureusement le public, les bénévoles, ses musiciens… « Vive la jeunesse » s’écrie t-elle. Touchante, débordante d’amour, elle quitte la scène sur un « What a Wonderful World » a cappella. What a wonderful girl, cette Dee Dee.
Photo-report par Pascal Thiebaut :
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