Lectrices rêveuses, lecteurs voyageurs, l’album » Nuages » du contrebassiste et compositeur italien Mauro Gargano est fait pour vous retrouver, même si le confinement et la distanciation de Covid 19 vous séparent encore. De plus, il vous porte chance puisqu’il est sorti un vendredi 13.
La ligne directrice de cet album est fuyante puisque le thème en est les Nuages justement, ceux qui vont et viennent, se font et se défont au gré des vents. Impossible de créer sur ce thème sans jouer Django Reinhardt, fils du vent, dont le plus célèbre thème se nomme » Nuages « . C’est le passage obligé et il clôt l’album (11), sans guitare, en laissant la porte ouverte à nos imaginations. Joué en duo contrebasse & clarinette,le thème en sort rafraîchi.
Une autre reprise, bien moins connue des amateurs de Jazz, encore moins s’ils ne sont pas Italiens, c’est la chanson de Domenico Modugno pour Toto (le Maestro italien de Louis de Funès, lui même d’origine espagnole. Entre aristocrates du rire, ils se comprenaient) dans la séance de Pier Paolo Pasolini » Che cosa sono le nuvole? » (1) du film collectif » Capriccio all’italiana » (1968. Le dernier film de Toto). La clarinette colle parfaitement à la voix humaine absente.
L’album suit une logique propre qui entraîne l’auditeur sans qu’il s’en aperçoive. Ainsi le 2e morceau, une composition, se nomme » Nuvole « . Logique après » Che cosa sono le nuvole ? » (1) et toujours dans la même ambiance rêveuse.
S’ensuit une danse du soir, » Danza della sera » (3) faite encore pour vous retrouver, lectrices rêveuses, lecteurs voyageurs.
Pier Paolo Pasolini, lui, revient avec une composition agitée comme les mauvais garçons de la banlieue romaine qu’il aimait tant et qui, officiellement, le tuèrent. » Pasolini (Nubi di periferia) » (8).
Autres allusions artistiques avec la Vénus au miroir, » Venere allo specchio » (4) à écouter en regardant les différentes versions de ce thème classique de la peinture européenne par Le Titien, Véronèse ou Velazquez.
Ou encore » L’isola di Arturo » (7), d’après le roman d’Elsa Morante, roman où un garçon qui a grandi sur l’île de Procida, au large de Naples, quitte le monde de l’enfance en se détachant de son père, de son île et en vivant chagrins et plaisirs d’amour avec des femmes. Tout un roman dans 7’44 de musique.
Une autre référence me revient qui ne figure pas dans cet album. » Aldilà delle nuvole » (1995) le film conjoint de Michelangelo Antionioni & Wim Wenders. Musique de U2, pas très Jazz donc.
Le jeu de batterie de Patrick Goraguer (le fils d’Alain Goraguer, pianiste et arrangeur de Boris Vian et Serge Gainsbourg?) n’ancre pas la musique. Il la propulse avec le piano de Giovanni Ceccarelli (un neveu italien d’André Ceccarelli, batteur français?) et la contrebasse de Mauro Gargano. Le choix de la clarinette ajoute à cette légèreté. Le jeu de Matteo Pastorini vient plutôt de Mozart que du Klezmer. Il donne encore plus de fraîcheur à l’ensemble. Trois Italiens et un Français jouent ensemble du Jazz d’inspiration italienne et française. C’est cela l’Union européenne, par delà les Alpes et les nuages.
En résumé, l’album « Nuages » de Mauro Gargano vous offre un beau voyage, lectrices rêveuses, lecteurs voyageurs. Profitez en pleinement pour nourrir votre imaginaire en ces temps de confinement en espérant pouvoir bientôt en profiter plus encore sur scène. Le concert de sortie est prévu en France, à Paris, au Sunside, le jeudi 3 décembre 2020 mais je doute fort qu’il ait lieu à cette date.
Interprètes :
Mauro Gargano: contrebasse, compositions sauf 1 & 11
Matteo Pastorino: clarinettes
Giovanni Ceccarelli : piano
Patrick Goraguer: batterie
Nuages est un album Diggin Music Prod, sorti le vendredi 13 novembre 2020
Concert de sortie prévu le jeudi 3 décembre 2020 au Sunside, à Paris – France.
La version mère de cette chronique est disponible sur l’excellent blog de notre partenaire « Le Jars jase Jazz ».
Guillaume Lagrée anime l’émission Le Jars Jase Jazz, sur Couleurs Jazz Radio. lundi 22H & vendredi 12H.
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