Joe Haider Sextet – As Time Goes By

Mais pourquoi diable certaines formations passent inaperçues ? Surtout quand elles délivrent un jazz de très haute qualité, à l’image du sextet de l’allemand Joe Haider.

Ce dernier, pourtant vieux requin des touches black and white et qui s’est fait le cuir des doigts avec Nathan Davis, Booker Ervin, Benny Bailey, Johnny Griffin, Philly Joe Jones, Joe Newman, Klaus Doldinger, Leo Wright, Peter Trunk, Dusko Goykovich, Pierre Favre, Klaus Weiss, Don Menza, Manfred Schoof, Mark Murphy , Hans Koller et d’autres encore, réunis ici trois générations de jazzmen dans un sextet…endiablé !

Il emmène donc une superbe formation qui incite tant à l’écoute religieuse qu’au battement de mains, de laquelle se dégage une atmosphère d’ensemble relevée néanmoins par les prodigieuses interventions des solistes.

La relecture du standard de Hupfeld « As Time Goes By » est une merveille d’arrangement grâce auquel tous les musiciens prennent part dans des chorus menés de main de maître par le bugle de Bert Joris avec un solo final étincelant.

Avec une écriture et des arrangements très soignés, le disque est l’œuvre des compositions originales des divers musiciens, hormis la reprise du standard précité. Chacun a mis sa patte à l’ouvrage et le tout balance un swing groovy non dénué de sensibilité à l’image du chorus de flute bien amené sur « Only For You« . Les volutes pyrotechniques de Joris très savamment contre-chantées par le trombone et le saxophone apportent un feeling musclé et doux à la fois.

L’ensemble très musclé n’en oblitère pas pour autant le jeu tout en finesse harmonique très recherchée du piano de Joe Haider, toujours présent à la relance comme au soutien. A noter que dans cet exercice, le trombone de Johannes Herrlich ne manque pas de brillance non plus. Sans parler de sa charge trombonistique sur le titre de sa plume « Hot Summer In Vienna« . Et le saxophoniste Heinz Von Hermann de faire de même sur sa composition « A Blow For Joe« .

Quant à Bert Joris, il n’est pas en reste sur sa ritournelle dansante « Benoit » avec la prime d’un changement d’instrument en cours de route…

Des configurations dans lesquelles bassiste et batteur tiennent une place non négligeable et assurent une assise rythmique très ajustée.

Une formation à inscrire au plus vite dans les charts de la qualité d’un jazz qu’on pourrait qualifier d’ancien et qui pourtant nous amène brillamment sur des chemins de jouvence, écriture et interprétation comprises. Pour preuve, les morceaux « But So Far » et « District West » qui concluent l’album et sont d’une modernité surprenante.

Et le bonheur de poursuivre la découverte de ce sextet sera complet en écoutant le dernier sorti en 2022 « Maria Magdalena« .