Jérôme Sabbagh – Heart

Installé aux USA depuis de nombreuses années, le saxophoniste français Jérôme Sabbagh a eu de nombreuses occasions de se confronter aux musiciens de la scène newyorkaise.

Il revient par ailleurs régulièrement dans l’Hexagone où Daniel Humair l’accompagne fréquemment en tournée. Mais c’est avec un autre batteur légendaire que Sabbagh rêvait de jouer : rien moins que l’immense Al Foster — aujourd’hui octogénaire — qu’il avait entendu live en trio, plus de trente ans plus tôt, avec le regretté Joe Henderson. Et c’est effectivement le trio du défunt saxophoniste qui sert de modèle à Sabbagh sur cet enregistrement plutôt que ceux de Sonny Rollins ou de Sam Rivers.

En effet le jeu de ténor de Sabbagh se caractérise par une grande douceur, un velouté totalement assumé, voire une tendresse sur les ballades et ne cherche jamais l’exploit virtuose. A part deux thèmes improvisés spontanément sans partition et où la complicité entre les trois musiciens est patente, c’est essentiellement à un répertoire de standards (« Prelude to a Kiss » de Duke Ellington, « E.S.P. » de Wayne Shorter et même « Body and Soul », qui reste un incontournable pour les saxophonistes ténors) et de compositions personnelles comme le morceau qui donne son titre à l’album que s’est consacré le saxophoniste.

©Photo Sherbvin Lainez

Il s’inscrit ainsi dans une lignée de souffleurs à la fois modernes et respectueux de la tradition. Sa sonorité limpide et son phrasé décontracté se marient fort bien avec le jeu de batterie de Foster qui privilégie les cymbales sur lesquelles il déploie une variété de timbres impressionnante et une grande finesse rythmique. Quant à Joe Martin, qui est un familier de Sabbagh, il soutient ses deux partenaires d’une pulsation souple et profonde tout à fait remarquable.

Soit un enregistrement réalisé dans les conditions du live sur un nouveau label qu’a créé le saxophoniste et qui s’attache à restituer la sonorité acoustique avec une grande fidélité.