Toku ? Une voix grave et profonde de crooner « inconfundible » …en espagnol, (car en français et en anglais ça ne sonne pas bien, dans tous les cas moins bien que son bugle) qui ne force jamais, une voix nonchalante et profonde, chaloupée avec de la tessiture, en ballade dans les rues de Paris ou sur la Seine.
Pour ceux qui ne le connaissent pas, en Europe ou ailleurs, Toku est un grand musicien reconnu depuis plus de 20 ans dans l’Ile du Soleil Levant, dont il s’est évadé… quelques jours pour se rendre à Paris, puis y retourne quand il veut (lui).
Il possède un son très personnel également quand il embouche ses instruments, le bugle le plus souvent mais aussi la trompette. Un son emprunt d’une douceur et d’une sorte de force tranquille.
Le Label Jazz Eleven, fondé par le pianiste Giovanni Mirabassi et la chanteuse, parolière et compositrice Sarah Lancman, enchaine les belles éditions, car ils continuent à croire au beau disque de jazz. En celà ils sont déjà remarquables et rares.
L’un de leurs secrets, que je vous livre ici, c’est de savoir convaincre les meilleurs : Thomas Bramerie, ce contrebassiste hors catégorie, a sorti son premier et unique album en tant que leader (Side Stories), chez Jazz Eleven.
Pierrick Pedron, l’un des saxophonistes majeur de la scène internationale, qui avait croisé Toku à New York et au Japon il y a plusieurs années, André Ceccarelli, le plus sûr batteur de l’Hexagone qui a assuré le tempo auprès de tous les musiciens les plus grands, assisté pour compléter cette rythmique délicate mais implacable, par Laurent Vernerey. Mais aussi Lukmil Perez, l’autre batteur favori de cette dream team, présent ici sur deux titres. En tout sept figures du jazz d’aujourd’hui qui ont plaisir à jouer et créer ensemble. C’est en tout cas ce que l’on ressent à l’écoute de l’album.
Toku in Paris nous convie donc à une ballade poétique dans son Paris, loin de celui que nous vivons ces derniers mois, piétons forcés… Et cela fait un bien fou !
En ce sens, l’album démarre sur un appel à ouvrir nos cœurs : « Loving is Calling You » auquel la voix de Toku nous entraine.
Le premier chorus de Pierrick Pedron au saxophone alto donne le ton, repris par la trompette de Toku… Nous sommes partis !
Puis deux poèmes écrits et mis en musique par Sarah Lancman s’enchainent dans un swing assuré par Dédé Ceccarelli et Laurent Vernerey pour She Comes Back Again et dans ce slow que l’on aimerait bien danser avec la femme de ses rêves, « After You » … Même si il s’agit d’une histoire de séparation, mais avec de l’amour toujours. Beaucoup de délicatesse et un toucher subtil de Giovanni Mirabassi au piano, assisté des balais d’André Ceccarelli dans ce slow.
L’album est fait de styles différents et chaque titre, chaque chanson, donne un tout, un produit -pour utiliser un terme marketing- homogène, au son bien rond.
Strollin’ in Paris est une balade inspirée à la fois par le pianiste Horace Silver (Strollin) et par la chanson de john Lewis, « Afternoon in Paris » avec un magnifique chorus de Pierrick Pedron en prime.
Dans Nuageux, le quartet, bugle, piano, basse, batterie, nous emporte au-delà des nuages, dans un film noir et blanc de Louis Malle inédit…
Et déjà quelle belle entrée en matière que ce solo de batterie d’André Ceccarelli, pour annoncer le bugle de Toku sur un tapis de gouttes d’or, distillées par le piano de Giovanni Mirabassi…
Be Careful. Ici Pierrick Pedron au saxophone et Giovanni Mirabassi se répondent et nous entrainent dans un 4/4 piégeur puisque s’y glisse une mesure à 3/4, en plein milieu. Restez concentrés ! Merci à Laurent Vernerey d’avoir passé l’obstacle tranquillement. Toku assure que seule la nécessité de la mélodie imposait cet écueil, facilement contournable par des navigateurs de cette trempe.
I Will Wait for You, le standard de Michel Legrand nous est proposé dans une version pleine de de fraîcheur, sans plus un grin de poussière, avec un magnifique duo Sarah Lancman / Toku – l’un des meilleurs duets entendu depuis longtemps- après une intro au piano de Giovanni qui sert de tremplin à la mélodie et au bugle de Toku. La rythmique est une fois de plus impeccable.
Still in Love With You. Encore une composition, cette fois parole et mélodie de Toku sur un Boléro inspiré d’un voyage à Cuba, qui fut une expérience musicale incomparable pour le musicien. Lukmil Perez, battteur cubain, prend ici les baguettes pour assurer un groove authentique ; il est soutenu d’une main à la fois ferme et souple, par Thomas Bramerie.
Sur Blue Smoke, c’est un duo piano-voix seulement, très épuré, sur un très beau texte de Sara et la musique de Toku.
A la fin du petit livret, dans lequel on peut retrouver toutes les paroles des chansons et les réflexions de Toku, inclus dans cette édition très soignée, Toku formule le vœu que « …cet album nous séduise et qu’il soit joué souvent… ».
Nous pouvons lui répondre que son vœu sera exaucé puisque l’album, Hit Couleurs Jazz, est dans son intégralité également, Sélection Couleurs Jazz Radio »
Le Bon Plan !
Le bon plan, pour une nouvelle fois utiliser un terme marketing à la mode : c’est de vous rendre nombreux à la Maison de la Culture du Japon, le 15 février 2020 à l’une des deux représentations, 16H30 ou 20H pour écouter en live, ces musiciens qui pourront vous dédicacer l’album.
Interprètes :
Toku, Voix, Trompette, Bugle ;
Pierrick Pedron, Saxophone alto ;
Giovanni Mirabassi, Piano ;
Thomas Bramerie, Contrebasse ;
Laurent Vernerey, Contrebasse ;
André « Dédé » Ceccarelli, Batterie ;
Lukmil Perez, Batterie.
Invitée :
Sarah Lancman, voix.
©Photos : Patrick Martineau – JzzM
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