Surnommé le « Parrain du jazz fusion » (ou jazz-rock pour les ex-fans des Seventies), le guitariste Larry Coryell est décédé dimanche, à l’âge de 73 ans. Il est mort de causes naturelles durant son sommeil, dans sa chambre d’hôtel à New York, après avoir donné deux représentations à l’Iridium Jazz Club, l’un des clubs réputés de Broadway.
S’il fut l’un des pionniers du jazz binaire à la tête de son groupe, « The Eleventh House » dès 1973, cet éblouissant virtuose de la guitare électrique aussi bien qu’acoustique, aimait beaucoup renouveler le langage de son instrument et fusionner d’autres genres.
https://youtu.be/APV2S_cX2_U
Ainsi, je me souviens l’avoir côtoyé, vu et entendu il y quelques années lors d’une édition du festival « Les Nuits de la Guitare » de Patrimonio en Corse. Côtoyé… Car à cette occasion, nous logions, lui, ses musiciens de flamenco emmenés par Juan Carmona et moi-même, dans le même hôtel.
Il adorait faire des longueurs dans la piscine et s’asseoir ensuite sur la terrasse pour préparer le concert de la soirée.
Très affable et curieux, il aimait surtout parler de ses projets futurs sans toutefois négliger les grands moments de sa longue et prolifique carrière.
Vu et entendu le soir, mélanger sa vertigineuse et éblouissante technique d’inspiration jazzy à celle de ses excellents acolytes plutôt versés dans les rythmes et les accords sévillans. Là encore la « fusion » a opéré entre des genres qui ne devaient pas forcément se rencontrer. La même année, il s’était produit lors du Monte-Carlo Jazz Festival, quelques heures après avoir appris la mort de celui qui fut son mentor, le batteur Chico Hamilton. Il avait profité du cadre grandiose de la salle Garnier de l’Opéra de Monte-Carlo pour lui rendre un vibrant hommage, tout en finesse, sensibilité et émotion.
C’est en 1966 que Larry Coryell, venu de la country et du rock, est engagé par Chico Hamilton pour graver « The Dealer« , un album qui déjà donne à entendre les inclinaisons à venir d’un jazz partagé en free (à grands renforts d’effets de saturation) et le côté « carré » du rock. Un savoureux cocktail stylistique que le guitariste, admirateur de Sonny Sharrock et de Jimi Hendrix, est en train de réaliser.
Et qu’il va surtout faire éclater au sein de son groupe « The Eleventh House » (outre le leader, Randy Brecker, trompette, et Alphonse Mouzon, batterie, notamment) entre 1973 et 1976. Une formation, qui comme « Return to Forever » de Chick Corea, le « Mahavishnu Orchestra » de son alter ego et « concurrent » John McLaughlin, « Weather Report » du tandem Joe Zawinul/Wayne Shorter et les « Headhunters » de Herbie Hancock, sera pionnière du mouvement.
Par la suite, il se produira avec tout ce que la planète jazz compte de guitaristes, de John McLaughlin à John Scofield en passant par Biréli Lagrène, Paco di Lucia, Al Di Meola et Christian Escoudé. Récemment, il s’était attelé à créer des oeuvres originales et notamment des opéras basés sur « Guerre et Paix » et « Anna Karénine » de Léon Tolstoï ou encore « Ulysse » de James Joyce.
Cet article est disponible également sur Jazz Gazette, le blog de Didier Pennequin !
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