Alex Sipiagin – Horizons

Alex Sipiagin n’est pas le premier musicien russe à émigrer aux USA. Avant lui on peut ainsi citer le pianiste Simon Nabatov ou son aîné et confrère trompettiste Valery Ponomarev avec lequel il partage une resplendissante virtuosité qui lui a permis de s’intégrer rapidement à la scène jazz étatsunienne..

On l’a ainsi vu jouer avec le Gil Evans Orchestra ou le Mingus Big Band, aux côtés de Michael Brecker, Gonzalo Rubalcacba ou Dave Holland. Du beau monde, donc !

Pour ce nouveau disque en leader on imagine que le trompettiste ne pouvait s’entourer que de musiciens appartenant à l’élite et c’est le cas avec Chris Potter, Eric Harland, Matt Brewer et le pianiste et claviériste britannique (établi aux USA) John Escreet.

A la tête de ce quintet de choc Sipiagin déploie une sonorité ample et magnifiquement timbrée et un phrasé qui passe de la langueur à la vélocité avec une aisance déconcertante.

Mais outre sa virtuosité habituelle on peut noter que le souffleur a acquis, depuis qu’il s’est installé voici quelques années en Italie, une touche de lyrisme qu’on peut sans doute attribuer à la proximité de ses confrères trompettistes transalpins.

Chris Potter, de son côté, rivalise d’inventivité et de fougue au saxophone ténor et, sur trois thèmes, au soprano. On sent que les deux souffleurs — qui se connaissent depuis qu’ils se sont côtoyés au sein du Mingus Big Band — partagent une même vision du jazz, une façon chaleureuse et généreuse de faire sonner les compositions — majoritairement de Sipiagin, qui reprend aussi deux thèmes de Pat Metheny — qui leur permet de mettre leur technique impressionnante au service de la musique sans chercher l’exploit démonstratif. Ils sont amplement aidés dans ce domaine par l’accompagnement rythmiquement et harmoniquement inventif de John Escreet, qui mérite une attention particulière tant il recèle de surprises et de détours inattendus.

Hormis son jeu de piano, le britannique propose aux claviers des nappes de son discrètes et fort à propos qui donnent au groupe une couleur inédite et bienvenue.

Quant à la paire rythmique, elle soutient l’ensemble de bout en bout de façon remarquable.

C’est donc ici un excellent enregistrement qui se place dans l’esthétique post-hard bop sans recourir aux clichés du genre et en affirmant une personnalité tout à fait convaincante.