Festival Jazz à Junas « Rencontre avec la Serbie » 16-19/07 2025

Cette 32e édition de Jazz à Junas concoctée avec le pianiste Bojan Zulfikarpasic nous a donné l’occasion d’entendre et souvent de découvrir des artistes originaires de Serbie encore peu connus en nos contrées.

Mercredi 16 juillet 2025

On a retrouvé dans la prestation de Bojan Z au Temple de Junas ce qui fait le charme de son dernier album « As Is« , récemment paru sur le label Paradis Improvisé. C’est à dire une manière unique de marier en un tout cohérent son apprentissage classique, les influences balkaniques et le souffle généreux d’une culture jazz transmise par Clare Fisher. Ceci est exprimé par les développements mélodiques tissés par une main droite véloce et cadrés par le soutien musclé de la gauche auxquels se mêlent malicieusement des effets de percussion sur le cadre du piano. En ressort une manière d’exposer une mélodie avec ce sens de la note juste et de l’épure qui amène son art au plus haut.

Après ce brillant début, la soirée s’est poursuivie dans le cadre somptueux des Carrières par la prestation de la talentueuse violoniste – chanteuse Yvette Holzwarth et du guitariste virtuose Miroslav Tadic qui ont présenté un large éventail des styles ayant jalonnés leur itinéraire personnel : musique classique, mélodies slaves, folk, gospel et un jazz feutré où plane l’ombre de Billie Holiday. Une belle découverte et un moment de convivialité privilégié.

Puis vint l’Eyot Quartet qui a dispensé un jazz fusion soigné et rigoureux, bien ancré dans l’actualité avec un répertoire où dominent les compositions du pianiste Dejan Iljić interprétées sans grande surprise par des musiciens qui se connaissant bien, le tout structuré confortablement par les lignes de basse de Marko Stojiljkovic, les envolées du guitariste Sladjan Milenović et la batterie de Milos Vojvodic.

Temple :

Bojan Zulfikarpasic : piano (Serbie, France)

Carrières du Bon Temps :

Miroslav Tadic : guitare,

Yvette Holzwarth : violon (Serbie)

Eyot Quartet (Serbie)

Dejan Ilić (piano, synthétiseur),

Sladjan Milenović (guitare),

Marko Stojiljković (guitare basse),

Miloš Vojvodić (batterie).

Jeudi 17 juillet 2025

Le lendemain le Trio Sélène présentait au Temple un répertoire de compositions originales et de chansons arméniennes actualisées par des arrangements mariant harmonieusement les sons du violoncelle électroacoustique de Mélanie Badal, la guitare de Blaise Cadenet et la batterie de Mahesh Vingataredy. Organisé sous l’égide de Jazz Migration, ce concert porte de belles promesses.

Quelques instants plus tard, nous attendait aux Carrières le trio du contrebassiste Nenad Vasilic, un artiste militant nommé en 2018, ambassadeur de la plateforme « La Serbie crée ». Leur prestation fut une occasion d’apprécier la beauté des mélodies du leader inspirées par la musique des Balkans et les couleurs inédites de l’alliage sonore saxophone soprano-accordéon (C’est la vie, San Francisco Dance).

À la fin du set, ces maîtres-mélodistes invitèrent en toute convivialité le pianiste Bojan Z qui prit peu après leur suite pour présenter, entouré de Rémi Vignolo (contrebasse) et Pierre-François Dufour (drums, violoncelle), son nouveau projet intitulé « Meteq ». Cette fine équipe fut rejointe par Thomas de Pourquery, un franc-tireur du jazz venu en guest star, qui apporta à l’ensemble la sonorité ample et généreuse de son saxophone alto et la séduction de son chant (Mashala). Ces joyeux drilles interprétèrent en rappel un thème de Tom Waits qui enchanta le public dansant devant la scène.

Temple :

Sélène (Ile de la Réunion, AJC) :

Mélanie Badal : violoncelle et voix,

Blaise Cadenet : guitare,

Mahesh Vingataredy : batterie.

Carrières :

Nenad Vasilic Trio (Serbie)

Nenad Vasilic : contrebasse,

Romed Hopfgartner : saxophone soprano,

Marko Živadinović : accordéon.

Bojan Z “Meteq” invite Thomas de Pourquery (Serbie, France)

Bojan Zufilkarpasic : piano,

Rémi Vignolo : batterie,

Pierre-François Dufour : violoncelle,

Thomas de Pourquery ; saxophone et chant.

Vendredi 18 juillet

Le lendemain au Temple, on retrouvait l’accordéoniste Marko Živadinović qui s’est imposé au cours d’un beau concert comme un soliste de grande classe et un conteur hors pair. Une technique acquise par la pratique du classique et sa connaissance de la musique populaire serbe exprimée par ses compositions, lui ont permis d’honorer avec authenticité cette tradition dont il livra toute la grandeur.

Le soir aux Carrières le Majamisty Trio s’est présenté comme une formation de pointe du jazz serbe en proposant un répertoire constitué des compositions de la pianiste Maja Alvanović, impeccablement interprétées avec rigueur et swing.

Changement de genre et de puissance sonore avec Ana Popovic qui arriva sur scène en talons aiguilles, moulée dans un ensemble d’un rouge flamboyant. La guitariste serbe a dépassé son statut de vedette féminine du blues rock pour exprimer d’autres facettes de son talent au travers d’une production s’ouvrant sur des perspectives musicales où fusionnent, en un ensemble hautement personnalisé, le blues, la soul, le funk et le gospel.

Sa voix est désormais mise en avant pour servir un répertoire plus varié témoignant de la période difficile qu’elle a connue mais aussi porteur d’espoir et d’optimisme.

Particulièrement inspirés ses musiciens, qu’elle sait aussi mettre valeur, la soutiennent avec ardeur en dispensant un groove dansant puisant ses racines chez Stax et Motown. Un concert dont le public ravi se souviendra.

Temple:

Marko Živadinović: accordéon (Serbie)

Carrières :

Majamisty Trio (Serbie)

Maja Alvanović : piano,

Ervin Malina : contrebasse,

Lav Kovač : batterie

Ana Popovic Sextet (Serbie, États-Unis)

Ana Popovic : guitare et chant,

Cory « Buthel » Burns : basse et choeurs,

Michele Papadia : Hammond, claviers et choeurs,

Kwesi Robinson : batterie et choeurs,

Claudio Giovanoli : saxophone alto,

Davide Ghidoni : trompette.

Samedi 19 juillet

La place de l’Avenir accueillait à 18 heures le concert du Minots Jazz Gang préparé au cours de quatre stages d’une semaine qui ont permis aux jeunes participants de travailler, sous l’égide bienveillante de professeurs très impliqués, l’improvisation, les percussions et le slam. Leur prestation proposait une reprise enlevée et hors des sentiers battus de Caravan, le tube de Juan Tizol et de Duke Ellington, et une démonstration de slam qui ravirent les spectateurs et parents venus en force. Cette activité essentielle et hautement symbolique met en avant le travail de fonds des organisateurs car l’expérience a montré que certains de ces jeunes stagiaires se retrouvaient plus tard dans la formidable équipe de bénévoles qui fait la force du Festival de Junas.

À 21 heures aux Carrières était programmé un concert de Louis Sclavis.

Depuis l’époque où il effectuait ses premiers pas avec le Workshop de Lyon, Sclavis a trouvé dans les musiques du monde une source d’inspiration constante. Cette fois-ci, c’est le souffle musical d’une Inde imaginaire qu’évoque son nouveau projet, fort justement intitulé « India ».

Comme d’habitude, Sclavis a intégré ces références à son univers en signant des compositions dont les mélodies, brillamment dessinées au cours de solos et de duos auxquels il participa en compagnie d’Olivier Laisney et Benjamin Moussay, s’appuient sur le soutien solide propulsé par la batterie de Christophe Lavergne et la contrebasse de Sarah Murcia (Madras Song, Un théâtre sur les Docks et la suite en quatre parties Long Train).

Une musique d’un haut standing interprétée avec élégance.

Il revint ensuite à l’Ekrem Mamutović Orkestar, une fanfare serbe de qualité dont le répertoire de titres dansants et de mélodies entraînantes enthousiasma le public qui termina le set debout.

Une 32ème édition festive et riche en belles surprises.