“Contrasts” , est le 4ème album en tant que leader du pianiste-compositeur Matthieu Marthouret…
…après “Playground” 2009, “Upbeats” 2012 et “Smalls Streams… Big Rivers” 2014. C’est aussi le 2ème album de la formation Bounce Trio, avec comme invité le guitariste Serge Lazarevitch.
Un Jazz moderne, inspiré, influencé, varié, avec du groove et de l’émotion (ce qui est l’essentiel ! N’est-ce pas ?)
Des titres originaux composés principalement par Matthieu Marthouret et également Serge Lazarevitch, des impros et des reprises comme « Shine on You Crazy Diamond » des Pink Floyd, ou « Kind Folk » de Kenny Wheeler.
Matthieu Marthouret et le Bounce Trio + Serge Lazarevitch seront au studio de l’Ermitage à Paris, France – mercredi 23 novembre à 21h
Et au studio 105 de la Maison de la Radio toujours à Paris, samedi 25 mars à 17h30
Line Up :
Matthieu Marthouret (orgue & claviers)
Toine Thys (saxophone ténor & clarinette basse)
Gautier Garrigue (batterie)
Featuring
Serge Lazarevitch (guitare)
Itv Exclusive Couleurs Jazz :
Couleurs Jazz : Matthieu, peux-tu nous expliquer ce projet « Contrasts » et déjà, pourquoi ce titre ?
Matthieu Marthouret : J’ai choisi ce mot car il est commun à plusieurs langues, ce qui est pratique, qui plus est pour la musique qui est souvent considérée comme un langage universel…
Il est souvent utilisé pour l’image mais il s’utilise aussi parfois pour décrire des ambiances sonores : un synonyme de “nuances” en quelque sorte…
Je pense aussi que le contraste c’est la variété et c’est ce qui rend les choses intéressantes. En d’autre termes, c’est la source de beaucoup de richesses : si tout était uniformisé, alors quel ennui, non !? Enfin, ce mot représente bien le jazz en général et mon univers musical en particulier.
Avec BOUNCE Trio, nous pouvons aussi bien nous ré-approprier des compositions de Thelonious Monk ou Wayne Shorter ou des reprises de Pink-Floyd, Burt Baccharach et Stevie wonder : cela n’empêche en rien la cohésion du son d’ensemble qui est alors apportée par la sensibilité, l’interprétation de chacun des musiciens mais aussi les goûts et les références que nous avons en commun.
CJZ : Expliquer la musique comme tu cites excellemment Thelonious Monk, dans ta page FB, « Tenter d’expliquer la musique, c’est comme tenter de danser l’architecture ». Peux-tu donc tenter ce tour de force (sans forcément expliquer ta musique), dire ce qui a conduit à la création de cet album ?
MM : Tout d’abord, la musique c’est ma passion depuis l’adolescence et je m’y consacre à plein temps depuis plus de quinze ans : elle est donc devenue nécessaire à mon équilibre personnel…
Ensuite cela prend une toute autre dimension quand on partage ce plaisir avec d’autres musiciens et qu’on a l’opportunité de la partager avec le public : une fois qu’on y a goûté, notre rôle d’artiste prend tout son sens et cette sensation devient un moteur essentiel…
Je pense aussi que c’est un certain élan créatif et un besoin de documenter le fruit d’un travail avec un groupe régulier qui guide les artistes car aujourd’hui, avec une industrie discographique moribonde, il devient très rare qu’un musicien se voit donner les moyens matériels et logistiques pour enregistrer un album.
C’est également un moyen de se faire connaître, car dans le milieu musical comme ailleurs, les musiciens sont souvent contraints d’avoir régulièrement quelque chose de nouveau “à vendre”…
Quant à sortir 2 albums en 2 ans avec la même formation, c’est de plus en plus rare ! Mais ayant beaucoup joué avec Bounce, le retour du public y est aussi pour quelque chose…
Tout cela m’a poussé, comme de plus en plus de musiciens, à faire le choix de l’autonomie en créant mon propre label. Je dispose maintenant d’un outil qui permet de diminuer le nombre d’intermédiaires et de beaucoup moins dépendre des contraintes de calendrier des rares labels apportant un réel soutien aux musiciens et au développement de leur carrière…
En revanche, cette liberté se paie en temps, avec de nombreuses heures passées à l’organisation logistique et l’administration, mais c’est une expérience enrichissante qui permet d’avoir une vision encore plus large du métier !
Pour en revenir à la musique de BOUNCE, les morceaux que j’écris pour cette formation sont généralement construits sur de petites cellules rythmiques et souvent accompagnés d’une trame harmonique cyclique.
Quand j’ai créé ce trio en 2012, j’avais envie de composer des morceaux aux structures plus condensées et un peu moins “écrites” que pour ma précédente formation ORGAN QUARTET, avec comme objectif de laisser un maximum de place à l’interprétation et à l’improvisation.
Le “bounce” en jazz, c’est le swing, le rebond, le groove… Bref le rythme au sens large de terme !
CJZ : Quelles sont tes influences ? Les musiques et les musiciens ou formations qui t’inspirent ?
MM : Question difficile car il y en a tellement, conscientes ou non et on ne finit jamais de découvrir des artistes intéressants quelles que soient les étiquettes !
Mais je citerais volontiers : Miles Davis, Joe Zawinul, Wayne Shorter, Brad mehldau, David Bowie, Steely Dan, Paul Simon, Paul motian, Thelonious Monk, The Meters, Bach, Chet baker Antonio Carlos Jobim, Herbie Hancock, Horace Silver, Keith Jarrett, Philip Glass, Frederic Chopin, Stevie wonder, Charles Mingus, Larry Young, Lee Morgan, Grant Green, Nick Drake, Sonny Rollins… (liste dans le désordre et non exhaustive).
Et puisque l’on est dans les citations, Duke Elligton disait aussi: “Il n’existe que deux sortes de musique : la bonne et la mauvaise.”
CJZ : Un mot sur le choix des musiciens qui composent votre trio + Serge Lazarevitch ?
MM : John, Brian et Joshua (Scofield, Blade et Redman…) n’étant pas disponibles, j’ai fait appel à Toine, Gautier et Serge ((Thys, Garrigue et Lazarevitch) et je dois dire qu’au final, je ne regrette pas du tout ce choix…
Plus sérieusement, et comme pour tous mes précédents projets, c’est d’abord une histoire de rencontres et de “feeling”.
Aujourd’hui à Paris où je vis depuis bientôt 10 ans, il est possible de rencontrer de nombreux musiciens et de créer des affinités humaines et musicales, puis au moment où des opportunités de concerts se présentent ou lors de la création d’un nouveau projet, le choix se fait alors naturellement…
C’est ce qui s’est passé avec Gautier, qui est arrivé à Paris à peu près au même moment et qui par ailleurs était aussi mon voisin (on se croisait donc parfois à la boulangerie du coin).
Pour Toine qui habite Bruxelles, je crois me souvenir que notre premier échange a eu lieu sur… internet ! (plus précisément sur le quasi défunt MySpace, ancêtre de Facebook en quelque sorte). Puis je suis allé l’écouter quand son groupe passait à paris, nous avons commencé à répéter de manière informelle et j’ai ensuite fait appel à lui quelques fois en tant que “remplaçant” dans la formation précédente…
Pour Serge, c’est un peu différent : j’en entendais beaucoup de bien par Gautier qui a longtemps été son élève à Perpignan, Toine l’avait, je pense, un peu côtoyé en Belgique, et moi je l’avais entendu en concert au à Lyon au tout début des années 2000, quand j’y habitais.
Mais la première rencontre avec le trio a vraiment eu lieu quand nous sommes partis présenter notre premier album dans un petit festival à Montpellier. Serge habitant dans la région, nous lui avons proposé de se joindre à nous pour jouer quelques morceaux à la fin du concert et il a accepté. J’en ai gardé un très bon souvenir et j’ai ensuite naturellement pensé à lui au moment de créer un programme avec invité.
Serge est devenu professionnel dans les années 70, à l’époque où émergeaient Bill Frisell, Pat Metheny, John Scofied et au moment où la carrière de Keith Jarrett explosait avec des artistes comme Paul Motian, Charlie Haden…
Moi, c’est à la fin des années 90, début des années 2000, au moment où Brad Mehldau, Mark Turner, Joshua Redman, Kurt Rosenwinkel commençaient à se faire connaître en Europe…
Toine, c’est encore différent, (je ne sais pas trop), il se situe en Serge et moi.
Quant à Gautier, le plus jeune de nous quatre, il joue avec certains des musiciens les plus doués de sa génération mais également avec des musiciens plus expérimentés, ce qui contribue probablement à sa polyvalence et sa grande connaissance du jazz en général.
Nous incarnons tous les quatre des générations différentes et la complémentarité de nos parcours et de nos personnalités est une des raisons pour lesquelles, je pense, cette formule fonctionne.
Là encore, probablement une histoire de contrastes…
CJZ : C’est quoi le Jazz aujourd’hui pour toi ? Est-ce que ce mot a du sens ?
MM : C’est une question qui crée parfois le débat au sein même des musiciens qui jouent cette musique.
D’une manière générale, je pense que c’est une musique qui s’abreuve potentiellement de tous les styles, qu’il s’agit surtout d’un état d’esprit et j’ai envie de l’associer à ces mots: métissage, interprétation, liberté, improvisation, partage, expressivité, spontanéité, engagement, sincérité…
CJZ : Quelle est la question que tu aimerais que les médias te posent et à laquelle ils ne pensent jamais ?
MM : Qu’ils me posent une question à laquelle ils ne pensent jamais ! (mise en abyme ! ;-))
Sinon ? …Participer à un blindtest, c’est une manière d’écouter la musique toujours surprenante, qui limite les a priori et développe le sens critique et on (re)découvre beaucoup de morceaux que l’on n’aurait pas eu l’idée d’écouter.
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