African Jazz Roots – Seetu

A part dans le domaine du sport, la place qu’accorde la France aux membres de ses anciennes colonies comme de ses DOM TOM est assez restreinte.

Comparé au Royaume Uni — autrefois grand colonisateur, lui aussi, mais qui a su former un commonwealth avec les pays d’Afrique ou des Caraïbes sans parler du Canada, de la Nouvelle Zélande ou de l’Australie qui faisaient jadis partie de son empire — le nombre de musiciens africains ou originaires de l’Afrique et des Antilles dans le jazz français est notoirement faible, même s’il semble qu’à ce niveau les choses soient en train de changer.

L’existence du groupe African Jazz Roots est de ce fait d’autant plus remarquable qu’il fait figure de pionnier puisqu’il existe depuis 2012, date à laquelle le batteur français Simon Goubert et le joueur de kora sénégalais Ablaye Sissoko se sont rencontrés lors du festival de jazz de Saint Louis du Sénégal.

Une rencontre marquante pour les deux hommes et qui déboucha sur la formation d’un groupe dont c’est aujourd’hui la troisième mouture et qui nous propose un enregistrement longuement muri. Ce quintet dont Goubert et Sissoko sont les principaux compositeurs et arrangeurs (même si les autres membres contribuent eux aussi au répertoire) a développé une esthétique où les deux musiciens africains ne sont pas des invités chargés de « colorer » la musique mais des membres à part entière, contribuant à une sonorité de groupe qui ne tire jamais vers la world music.

Le seul thème composé par le joueur de calebasses voit ainsi Goubert développer, en duo avec son partenaire et sans avoir recours aux cymbales, un jeu sur les toms qui doit beaucoup à l’Afrique. Chacun des membres de ce quintet a donc fait un chemin vers l’univers de l’autre et la présence au sein de ce groupe d’un piano acoustique et d’une contrebasse — deux instruments généralement absents de la musique africaine traditionnelle ou moderne — montre bien cette volonté de développer une esthétique de l’échange et du mélange. C’est une musique joyeuse et festive que nous propose African Jazz Roots. Une musique où la mélodie et les rythmes se marient harmonieusement et où l’improvisation est bien présente.

Une belle réussite, donc, qui fait espérer que davantage de musiciens de jazz français feront le chemin vers leurs confrères nés sous les tropiques.