Premier des festivals de l’été à dévoiler sa programmation pour sa 59è édition, Jazz à Juan (du 12 au 21 juillet) apporte la preuve que des manifestations qui affichent le terme « jazz » ont de plus en plus de mal à s’en tenir à cette appellation stricto sensus. Et ce, essentiellement, pour des raisons de jauge !
En effet, comment remplir la célèbre Pinède Gould qui a vu défiler tant de figures historiques et éternelles du jazz – tout le monde a encore en tête (à défaut de se souvenir) l’extraordinaire concert donné par le Quartet de John Coltrane en 1965 et l’unique évocation en public de l’album A Love Supreme ! – avec certains des jazzmen d’aujourd’hui, même parmi les meilleurs et les plus « bankable » ?
Vieillissants, malades, fatigués voire décédés, plusieurs de ceux (et celles) qui avaient fait la renommée du festival d’Antibes sont désormais absents de la scène.
D’où cette « ouverture » obligée pour attirer un maximum d’audience avec la présence du chanteur Jamiroquai et son acid jazz, du folk-blues-rock de Ben Harper, du rock progressif anglais légendaire de King Crimson (créé en 1969 par Robert Fripp, toujours à la manœuvre), du tellurique Magma du batteur Christian Vander (fan de John Coltrane !) et du kitchissime groupe américain Pink Martini, avec comme invités Jane Birkin et Christophe Willem (pour une création).
Quid du jazz ?
Présent quand même avec des locomotives : le virtuose de la guitare, fidèle disciple de Wes Montgomery, et surtout brillant crooner George Benson (il faut se rappeler son tube, Give Me The Night – 13 juillet), la chanteuse et pianiste canadienne Diana Krall (19 juillet), dont la présence scénique et musicale est toujours un ravissement et un enchantement, et le groupe du très demandé batteur tout terrain Steve Gadd (13 juillet). Voire de Thomas Dutronc (20 juillet) et ses références manouches.
Ensuite la nouvelle génération. Dont le fer de lance est incarné par le collectif, formé au Texas et aujourd’hui basé à Brooklyn, Snarky Puppy (17 juillet). Dirigé par le bassiste/compositeur et producteur Michael League, ce groupe, multi primé aux Grammy Awards, pratique une sorte de jazz qui emprunte à toutes les composantes de la musique afro-américaine, faisant éclater les chapelles sous les coups de butoir de ses souffleurs. Leur dernier CD, Immigrance (GrounUp Music) en est l’illustration parfaite.
Grâce au contrebassiste Avishai Cohen, une école de jazz israélienne a pu éclore à l’international, principalement en Europe et aux Etats-Unis.
Omri Mor et Eli Degibri en sont quelques-uns des probants exemples.
Le premier (14 juillet), pianiste de son état né à Jérusalem et découvert justement par Avishai Cohen, avant d’être membre de la formation d’Avishai Cohen, le trompettiste, se veut un musicien de « synthèse » entre les cultures et les styles.
Le second (19 juillet), saxophoniste ayant côtoyé Herbie Hancock dès son plus jeune âge (19 ans, c’est dire !), a soufflé avec le vénérable batteur de Miles Davis, Al Foster, avant de devenir une figure majeure du jazz actuel.
Sans oublier une attention particulière à porter à la jeune saxophoniste-alto néerlandaise Candy Dulfer dont le groove et la technique irréprochable ont séduit les plus grand(e)s, de Van Morrison à Aretha Franklin en passant par Prince et Madonna (19 juillet).
Enfin, il faut louer la volonté de Jazz à Juan et de son directeur artistique, Jean-René Palacio, de coupler les artistes entendus et découverts lors de « Jammin’ Juan » – le marché des professionnels de jazz, initié depuis deux ans à l’automne par Philippe Baute, directeur de l’Office du tourisme d’Antibes/Juan-les-Pins – à la « Jammin’ Summer Session », en off des concerts en soirée.
Seront ainsi programmés, l’éloquente trompettiste canadienne Rachel Therrien, le Trio de Philippe Villa et des musiciens venus de divers horizons et pays.
©Photo couverture et Header Gilles Lefranc.
COMMENTAIRES RÉCENTS